Post Rock, Post Metal Doom, Sludge, Trip Hop, Prog, Mathrock, Chaotic Hardcore. Des mots tout cela, des étiquettes. Laissez-vous guider par mes émotions. Orienter les vôtres et vous donner de quoi rêver. Planer ou encore vous déchaîner.

Cher lecteur, chère lectrice. J’ai pour toi une question à laquelle je te demande de bien réfléchir avant de penser ta réponse. Oui, penser, car forcément, je ne t’entendrai pas me répondre dans l’avenir, vu que tu liras ces mots dans un moment futur de ta vie, ce qui implique donc que je t’écris depuis le passé si tu suis bien. Cher lecteur, chère lectrice, ma question est la suivante : as-tu déjà été défoncé au moins une fois dans ta vie ? Je veux dire, vraiment défoncé au point que tes pieds et ta conscience se retrouvent balancés sur une exoplanète comme Kepler 62 F. Pense ta réponse et transmets-la moi à travers les temps, dans le subconscient collectif social. En attendant, je peux t’assurer que de mon coté après investigations, je connais un groupe qui connaît véritablement la sensation de défonce. Dictateur en détient les secrets et les essences. Vibrations, leur premier opus, va te guider à travers l’univers instable et infini, distordu et en distorsion continue.

Dictateur, c’est deux mecs, que l’on nomme Frère I et Frère I (oui, le même nom, pas la même aura, pas la même apparence mais la même philosophie interstellaire) et qui ne proviennent pas de la Terre. Non. D’une autre planète. Mais laquelle, te demandes-tu. Je n’ai pas obtenu son nom mais très éloignée de notre Voie Lactée, peut-être Kepler 62 F justement. Ils sont tout-puissants, omniscients et prétendent réclamer une place sur Terre qui leur est dûe : Celle du statut de dieux. Alors, pour nous convaincre, ils nous envoient la parole sacrée sur Vibrations, qui n’a ni plus ni moins l’intention d’être élevé au rang de bible. Tout ceci vous paraît sectaire ? Mensonger ? Attrape-nigaud ? Qu’il s’agit juste de deux cinglés supplémentaires dans la nature s’y croyant à fond ? Cher lecteur, chère lectrice, tu n’as jamais eu aussi faux dans ton existence parasitaire. Car Vibrations fait déjà partie des classiques « premiers albums fantasmagoriques ». Dans une autre vie, les Frères se sont révélés sous une identité humaine et ont officié dans Omaha Bitch. Si, si, jeune trentenaire, tu te souviens de ce clip « Dancing Cyprine », qui affolerait complètement la population terrienne s’il ressortait en ces temps macabres et tortionnaires que nous vivons.

Et si tu as toujours des doutes, plonge-toi dans le quantique « High ». Neuf minutes d’onirisme et de planage total qui vont, à la progression de la composition, se transformer en doom agressif et lourd comme un astéroïde fonçant à pleine puissance vers la Terre. Oui, notre Terre, menacée, que Dictateur nous invite à quitter si nous souhaitons la survie et non la miséricorde. Sur l’éponyme « Vibrations », les Frères ont invité M’Bouillé Koité en tant qu’ambassadeur de leur planète. L’énergie déployée dans ce psaume est tout simplement la perfection oratoire de l’union des peuples. Tout simplement impossible de ne pas se remuer et sentir le Guru s’imprégner en soi. « Rebirth » poursuit dans cette idée de vibrations célestes. Des chants timides et angéliques se veulent rassurants en arrière-plan avant de débouler sur la claque « Shemesh », première véritable accélération de Dictateur. Un chant posé et clair avec un rythme presque Nirvanesque, punk dans l’âme, grunge dans l’attitude. Oui, sur la planète de Dictateur, on ne fait pas que prier. On fait la fête, on bouge, on secoue sa tête et surtout, on dissocie son esprit du corps. Absolument jouissif, martial et jubilatoire.

On retombe ensuite de nouveau vers une autre surprise. Dictateur introduit dans sa musique des notions progressives aux accents Queen, kitsch assumé, et fait part d’un groupe capable de s’auto-réinventer. Le titre est sublime et possède un spleen dantesque qui n’est pas sans rappeler le « Bohemian Rapsody » justement. Comme un hommage à un autre temps. Comme une question posée dans le passé à un futur lecteur qui, en ce moment même, est en train d’être converti à la religion de Dictateur. Jugez plutôt avec ce clip original, mémorable, au final grandiose. Certains adorateurs pourront y déceler une touche de Ghinzu.

Pour la suite, il ne pouvait en être autrement. Je vous ai parlé d’Omaha Bitch plus haut dans ces lignes. Le frontman de l’époque revient également sur Terre pour prêcher la bonne parole sur « Demon ». Punk, sur un accordage nineties, Frère I chante son requiem en français s’il vous plaît. Avec la voie criarde de Benny Fucker, le résultat est imparable. À l’écriture de ces mots, je matraque une batterie invisible. Plus rock’n roll que ça, tu meurs, mon gars. « Glow » frappe fort et dur, doomiesque relent des nouvelles influences des Frères. Jouissif, délirant, psychédélique quantique et interprétations stellaires pour t’envoyer en l’air. Une invitation à t’envoler du sol terreux. Et de nouveau, un final puissant !

Il reste alors trois morceaux et malgré la bonne durée restante, le goût de trop peu se dessine déjà. « Spread » et ses « ouh ah ah » en forme de propagande devraient convaincre les derniers humains simiesques de rejoindre les rangs du groupe. Titre taillé sur mesure pour être joué sur scène. Le chamanisme des Frères n’avait déjà plus rien à prouver avant. Ce morceau enfonce le clou et annonce la fin du monde tel que nous le connaissons. Un choix va se présenter à vous, chers lecteurs, chères lectrices. Embarquer dans l’arche ou craindre l’ignorance jusque la fin. Avant le grand final, Dictateur offre un dernier temps de réflexion avec « Time ». Des teintes Pink Floyd explosent les oreilles derrière cette ligne de basse absolument envoûtante, un peu un hommage à « Set The Control For The Heart of The Sun » pour les connaisseurs. Mélodique et pourtant si puissant. Rassurant et pourtant si inquiétant. De nouveau, l’esprit n’obéit plus au corps. Le solo final est parfaitement placé.

Enfin, ce grand final tant attendu (ou redouté car on en veut plus) remporte la palme de la défonce avec « Quantumlove ». Onze minutes de doom frôlant le chaos et l’extase la plus barrée. Un ange pose sa voix et finit de convaincre de suivre les Frères dans ce voyage de l’esprit. C’est lent, c’est lourd avec des voix claires, une intensité qui va crescendo jusqu’à la libération de la croyance. Il faut juste à cet instant, ne plus bouger et fermer les yeux. Franchement, Kepler 62 F ça a vraiment l’air pas mal, non ? Moi, je signe pour l’extraction de ma carcasse immédiatement.

Les Frères I et I ont accepté de se laisser prendre en photo à l’issue de leur premier set terrestre en 2019. Que leur volonté soit faite! Gloire.

Alors cher lecteur, chère lectrice, je te repose la même question qu’au début de ces dithyrambes : As-tu déjà connu la défonce totale, l’extase la plus transcendante qui puisse se ressentir ? Peut-être en as-tu certaines notions. Certes. Mais, toi qui te trouves situé dans l’avenir, tu n’as pas encore découvert Vibrations de Dictateur. Je t’écris depuis le passé car j’ai effectué ce voyage intérieur jusque Kepler 62 F depuis la Terre. Je ne l’ai jamais regretté. Et je ne peux que t’encourager à immédiatement écouter cet opus démentiel, osé, assumé, mature et naïf à la fois. Mais sans naïveté dans la vie, on n’aboutit nulle part. Longue vie aux Frères I et I. Longue vie à Dictateur.

Bonne écoute.

  • Tiph

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