Post Rock, Post Metal Doom, Sludge, Trip Hop, Prog, Mathrock, Chaotic Hardcore. Des mots tout cela, des étiquettes. Laissez-vous guider par mes émotions. Orienter les vôtres et vous donner de quoi rêver. Planer ou encore vous déchaîner.

Se faire transpercer. Ressentir le mal, la joie, des émotions contradictoires en un seul et même ressenti. Pleurer et rire à la fois. Croire et désavouer. Être attentif et apprendre le lâcher prise. Être beau, être laid, être pieux, être hérétique. Pêcher, vénérer. Vivre, laisser vivre… Autant de perspectives qui se déroulent lorsque l’on se plonge dans un album de Lingua Ignota, alias Kristin Hayter, l’américaine multi-instrumentaliste expérimentale dans ses formes les plus pures et les plus extrêmes.

Pas forcément dans la violence des instruments, non. Dans la violence du contenu, de l’arrière-pensée, de la fragilité qui se mue en tyrannie ou vice-versa, de la forme la plus abrupte de l’esprit, de l’inconscient et de ces vingt-un grammes d’âme qui compose notre anima. Pêcher pour prêcher, apporter une réponse à l’inconnue. Bref, autant de sentiments complexes traversant mon corps à l’écoute Sinner Get Ready.

Troisième opus pour Kristin, troisième signifiant généralement maturité artistique. Dans son cas, Lingua Ignota déjoue les pronostics car la maturité l’a vaincue il y a longtemps de par sa vie. Actuellement, elle est certainement l’une des artistes qui se rapproche le plus de ce qu’il se passe au fond de mon crâne, ma caboche si mal serrée, que mes lunettes tiennent en place. Seul Alexis Marshal a pénétré mon subconscient aussi puissamment. Et le hasard faisant toujours bien les choses, Kristin a deux pieds et huit mains dans l’album dont Anthony vous parle de son côté, parallèlement à moi. Bizarre, non ? Comme des évènements célestes peuvent s’annihiler l’un l’autre, ou bien comme dans ce cas, se complaire dans le sombre et le néant à la perfection. Dans le cas de Lingua Ignota, le visage s’efface derrière un mélange de perles, de sombres à claires, comme un masque cachant l’esprit, laissant à peine transparaître une humanité derrière le monstre qui se hante lui-même. Si All Bitches Must Die incarnait la violence, Caligula l’abstentionnisme de l’humain, Sinner Get Ready représente la sentence. Lourde, innommable, importable.

La nuance dans le feu de mon inaction, « Pensylvania Furnace ». Chien de la casse en mort, mon esprit s’envole avec lui. Un moment suspendu du temps et dans le temps comme pour expier la besogne d’exister. Des larmes ont explosé mes yeux lors de ma découverte de cette sérénade. Découvrir l’enfer en sa compagnie, oui pourquoi pas dans ces conditions. Reste-il des restes après ces cinq minutes quarante-sept ?  Oui, aujourd’hui. Mais il faut se repentir, se confesser pour espérer l’ultime sacrement. Le folk s’exprime à l’ukulélé, en veux-tu, en voilà mon ami. Ou devrais-je dire mon amie, toi la mort, qui m’attend à chaque coin de rue, premier feu rouge qui ne devient pas vert ? Je ne sais, j’hésite, je ne suis pas prêt à te rencontrer, surtout pas en cet instant.

Ce soir, je suis Covid Safe selon les standards. Sans rire, je n’ai eu d’autres choix qu’appliquer ce liniment sur mes muscles pour mon enfant. « The Sacred Linament Of Judgement » justement, est comme une crème passée sur mon épiderme en pitié de sensations, d’immenses abysses entre mon cœur et mes oreilles. Elles sont sourdes à ces lamentations en apparence, les atteignent dans leurs cellules profondes, évidemment.

Crédit: Emily Birds

J’ai fermé les yeux, Kristin a implosé en moi. J’ai des larmes d’écrire sur « Perpetual Flame of Centralia », second morceau d’esprit procuré de Lingua Ignota, vidéo-imagé quelque part par là. La crainte n’est rien quand la voie est juste. Comme un appel à croire en ses idéaux. Comme un jardin de fleurs sans mauvaises herbes. Un piano, des arrangements en sourdine, une voix surplombant la vie et le néant. Pourquoi, comment résister ? Il n’en est pas question. Car le cœur de l’Homme est une orchidée. De l’eau, du sang, de l’air, du feu. « Man is like a Spring Flower » veut apporter de la nuance dans l’écho. Un folk viscéral, une inspiration de plus traversant mon œil défaillant. Il n’est plus vie mais Kristin lui rend des larmes. Larme, larme, larme, ce putain de mot détaillant mon esprit à toi lecteur, à qui je m’ouvre plus que jamais. Peux-tu seulement imaginer mon tréfonds à travers ce que tu entends, lis, imagine ? Je n’en serais pas sûr, tu ne saisis pas ce que tu lis. Relis. Noël approche à petit pas, le viol aussi. As-tu regardé tes parents baiser ? La masturbation t’a fait mal ? Tu n’aurais pas dû, c’est tout. « The Solitary Bethren of Ephrata » conclut en douceur, en malfaisance, en incestueuse fraternité, en douceur mélancolique. En immonde attirance.

Il me reste une conclusion. Un repère à établir si toi, tu ne lis que de haut en bas, un mot sur trois ou ne saisit pas mon émoi à l’écoute de Sinner Get Ready. Plonge, laisse-toi envahir et respire cet air sale de poussière que Lingua Ignota insuffle à son univers. Même si la poussière dérange, n’oublions juste pas que nous l’étions. Et le redeviendront.

Bonne écoute

  • Tiph

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